Publicité politique : êtes-vous en règle ?
« Oui, je me conforme au RGPD et aux règles de la CNIL ! » répondez-vous ! Las, depuis le 15 octobre 2025 ce n’est plus suffisant ! Le point sur les conséquences pour les candidat.e.s de l’entrée en vigueur du règlement européen relatif à la transparence et au ciblage de la publicité à caractère politique.
Un règlement européen pour traiter de la compol nationale ?
Eh oui, comme le RGPD puisqu’il le complète ! Et comme il s’agit d’un règlement, son entrée en vigueur dans le droit français est automatique, sans qu’il ne nécessite l’adoption d’une loi nationale supplémentaire.
Que prévoit le règlement 2024/900 relatif à la transparence et au ciblage de la publicité à caractère politique ?
Constatant que « L’offre et la demande en matière de publicité à caractère politique ne cessent de croître et revêtent de plus en plus souvent un caractère transfrontière« , que dans ce contexte « il est fréquent d’utiliser des techniques de ciblage et des techniques de diffusion de la publicité sur la base du traitement de données à caractère personnel, y compris des données à caractère personnel observées et déduites, telles que des données révélant des opinions politiques et d’autres catégories particulières de données« , il a semblé essentiel au législateur européen de mieux protéger les électeurs par le biais de ce règlement 2024/900 du Parlement européen et du Conseil du 13 mars 2024 relatif à la transparence et au ciblage de la publicité à caractère politique, que l’on désigne déjà sous son abréviation « RPP ».
Une définition de la publicité politique
Le support (papier ou digital) importe peu, ce qui compte :
- que la campagne ait été conçue par ou pour le compte d’un « acteur politique » (candidat, parti, etc. désignés dans le règlement par le terme « parraineur« ) et ce, directement ou indirectement ;
- ou qu’elle soit susceptible et conçue dans le but d’influencer le résultat d’un vote ou processus législatif (coucou les lobbyistes de tout poil : ce texte s’applique aussi à vos campagnes !).
Ne relèvent pas de cette définition et partant, ne se voient pas appliquer le RPP :
- les affichages sur les panneaux électoraux et de manière générale, toute action de campagne tenue dans un espace public (banderole dans une manifestation par exemple) ou encore de communication publique ;
- une opinion exprimée dans un véritable média, pourvu d’une rédaction chargée de contrôler et vérifier les propos (hors, bien-sûr, publi-reportage) ;
- les opinions personnelles exprimées sur un réseau social, si tant est qu’elles soient réellement spontanées et personnelles, et pas « commandées ».
Quid du ciblage et de la diffusion de la publicité à caractère politique en ligne ?
Vous faites campagne sur les réseaux sociaux, vous diffusez des newsletters de campagne, vous avez ouvert une chaine WhatsApp de campagne et vous traitez des données personnelles pour que votre message porte en particulier vers certains de vos électeurs ? Vous devez prendre en compte le RPP !
Vous pouvez continuer de cibler, à certaines conditions :
- exclusion absolue des jeunes de moins de 17 ans ;
- tenue d’un registre dédié (catégories de données personnelles utilisées pour le ciblage, utilisation de systèmes d’IA, …)
- les données utilisées pour procéder au ciblage doivent avoir été collectées directement auprès de chaque personne (pas de données issues des listes électorales ou achetées / louées chez un broker) ;
- chaque personne ciblée doit vous avoir confirmé son consentement exprès (et, conformément au RGPD : libre, éclairé et univoque). Vous devez également prévoir des alternatives satisfaisantes pour que les personnes ne vous ayant pas donné leur consentement puissent bénéficier du même niveau de service/d’information ;
- enfin, des mentions spécifiques doivent être reportées sur vos communications (voir ci-après).
Attention : la notion de ciblage va ici plus loin que celle de profilage utilisée dans le RGPD !
Quid des autres types de prospection / promotion ?
Le RPP ne s’applique pas, par exemple, à l’envoi d’une newsletter à un groupe de personnes ayant renseigné leur adresse mail à dessein ou à un courrier aux adhérents d’un parti ou micro-parti.
En revanche, le RGPD continue, lui, de s’appliquer.
Aussi devrez-vous veiller à :
- respecter les droits des personnes et vos obligations quant à leur bonne information,
- limiter au maximum la collecte des données,
- mais aussi à prévoir une durée de conservation restreinte à votre plus strict besoin.
Quelles mentions prévoir sur les supports de communication électorale concernés par l’application du RPP ?
Dès la création d’un support de campagne, prévoir le marquage obligatoire qui doit être, selon les prérequis de l’article 11 du RPP :
- inclus dans, apposé sur ou associé à la publicité,
- lisible, visible (ou audible) et se distinguer clairement.
Concrètement, l’on doit retrouver :
- une formule type « annonce publicitaire à caractère politique »
- l’identité du « parraineur » (cf. ci-avant)
- le lien entre la publicité et l’élection doit être clairement mentionné (« cette annonce publicitaire est rattachée à l’élection municipale des 15 et 22 mars 2026 » ; ou « à l’élection législative »)
- en cas d’utilisation de techniques de ciblage et/ou de diffusion d’annonces publicitaires s’appuyant sur des données à caractère personnel, le préciser en toutes lettres
- un avis de transparence reprenant les informations sur les montants utilisés ou l’origine de ces montants (à noter : toute publicité de parraineurs extérieurs à l’Union européenne est prohibée dans les 3 mois précédant un scrutin).
Lorsqu’il n’est matériellement pas possible d’inclure l’avis de transparence directement dans le support, il est possible d’indiquer un QR code ou une URL renvoyant vers une page dédiée. En ce cas, le lien doit apparaître en gras ou dans une couleur différente du reste du texte.
A lire en complément pour bien adapter votre avis de transparence à votre publicité : la fiche de la CNIL « Les mentions d’informations requises pour la communication politique« .
Plus de ressources
Pour mieux l’appliquer, la Commission européenne propose des lignes directrices et la CNIL propose quant à elle 6 fiches pratiques. En outre, l’ARPP (autorité de régulation professionnelle de la publicité) apporte sur son site des
/ NOTA /
Cette note non exhaustive est proposée à titre d’information. Il appartient systématiquement au lecteur/à l’utilisateur de vérifier (ou faire vérifier par un conseil) l’évolution législative et jurisprudentielle du cadre et des mentions avant de le reporter et/ou de l’adapter sur ses supports de campagne ainsi que de consulter un professionnel reconnu au moindre doute quant à son application.