Dans l’opposition, maîtriser ses droits, c’est optimiser l’exercice de son mandat
Longtemps on a pensé que les élus d’opposition étaient, au mieux un boulet passif mais nécessaire, au pire un caillou parfois douloureux dans la chaussure. Et pourtant, des élus d’oppositions actifs et constructifs, j’en connais … et plutôt efficaces en plus ! Leur secret : leur maîtrise du CGCT (et du règlement intérieur de leur collectivité) que je vous partage ici !
Constituer un groupe politique fort
L’union fait la force ! Chaque fois que c’est possible, formez un groupe politique.
Prévu à plusieurs endroits du CGCT (L.2121-28 CGCT pour les communes de plus de 100 000 habitants, L3121-24 CGCT pour les départements, etc.), c’est bien le règlement intérieur de la collectivité qui fixe les conditions de création et de fonctionnement d’un groupe d’opposition.
Ces groupes sont le plus souvent représentatifs des listes présentées au moment du scrutin, mais ils peuvent refléter d’autres réalités et même évoluer au cours du mandat : c’est une option à considérer si de nouvelles affinités (ou contractions !) se forment.
En outre, un budget peut être accordé au groupe par la collectivité « sur un chapitre spécialement créé à cet effet, (…) sans qu’ils puissent excéder 30 % du montant total des indemnités versées chaque année aux membres du conseil municipal, charges sociales incluses » (L2121-28 CGCT).
Sur ce budget, vous pouvez envisager de contracter quelques heures par mois avec un collaborateur de cabinet à temps partagé. Il ou elle pourra, en fonction de vos besoins, préparer les notes et prises de parole en assemblée, gérer les relations avec les administrés, animer vos réseaux sociaux, etc.
Vous pouvez bénéficier par ailleurs « pour [votre] usage propre ou pour un usage commun, d’ un local administratif, du matériel de bureau et [de la prise] en charge de vos frais de documentation, de courrier et de télécommunications » (L2121-28 CGCT).
Home sweet home !
L’article L2121-27 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) précise que « les conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale peuvent disposer sans frais du prêt d’un local commun » mis à disposition par le maire dans les 4 mois maximum après la demande.
On trouve trois cas de figure selon la taille de la commune :
- Pour les communes de moins de 3 500 habitants, le maire n’a aucune obligation légale de prêter un local aux élus de l’opposition. Il peut toutefois le faire à sa discrétion.
- Pour les communes entre 3 500 et 10 000 habitants, le prêt d’un local pour les élus d’opposition peut être permanent ou temporaire. Dans le second cas, la durée de mise à disposition du local ne pourra pas être inférieure à quatre heures par semaine, dont deux heures pendant les heures ouvrables.
- Pour les communes de plus de 10 000 habitants et plus, les conseillers municipaux de l’opposition peuvent disposer à leur demande d’un local permanent.
Attention, en principe, ce local n’est pas destiné à recevoir du public, mais uniquement à permettre aux élus de se retrouver pour travailler et préparer les actions relatives à leur mandat. Ainsi, dans la jurisprudence, on note que la contestation du local attribué par le maire au motif que celui-ci ne répond pas aux normes ERP est infondée.
Expression des élus minoritaires
Je vous renvoie à cet article précédent pour les détails, mais grosso modo, les élus minoritaires peuvent publier dans le magazine de la collectivité, dans lequel un espace propre doit leur être alloué ; mais aussi sur certains des réseaux sociaux de la collectivité (Facebook et YouTube notamment).
Pour rappel, cette obligation de réserver un espace d’expression s’applique aussi aux :
- départements (article L.3121-24-1 du CGCT),
- régions (article L.4132-23-1 du CGCT),
- établissements publics de coopération intercommunale (CC, CdA, métropoles, …).
Et pour rappel également, le maire (ou de manière générale tout président d’exécutif) n’a pas la compétence pour contrôler le contenu et la teneur du texte rédigé par l’opposition en vue d’y être publié (CE, 7 mai 2012).
Les droits communs à tous les élus
L’information en vue de l’assemblée
L’article L. 2121-13 du CGCT permet aux membres du conseil municipal d’avoir communication des documents qui se rapportent aux « affaires de la commune qui font l’objet d’une délibération », c’est-à-dire les affaires portées à l’ordre du jour.
C’est un bon point de départ juridique dans le cadre d’une majorité réticente à communiquer les éléments nécessaires à la bonne exécution de votre mandat.
Pour rappel, pour bien préparer votre participation à la session, revoyez dans votre règlement intérieur et le CGCT les procédures et délais en matière de proposition, d’amendement, de questions orales.
Les autorisations d’absence et crédits d’heures
Possibilité offerte à l’élu-salarié pour se rendre et participer aux séances plénières du conseil municipal, réunions des commissions dont il est membre, réunions des assemblées délibérantes et des bureaux des organismes où il a été désigné.
Il n’y a pas de durée fixée au préalable, contrairement aux crédits d’heures, autre aménagement pouvant être utilisé pour la gestion administrative de la commune ou de l’organisme auprès duquel il la représente, ou encore la préparation des réunions des instances où il siège, et dont la durée est elle fixée en fonction de la taille de la collectivité (se renseigner auprès du DGS par exemple). Dans ces 2 cas, il vous faut informer l’employeur par écrit au préalable.
Attention : ces heures ne sont pas rémunérées par l’employeur, mais une compensation financière peut avoir été prévue par votre collectivité.
🚩A noter 🚩
Le Code du travail permet à tout candidat à un scrutin 10 jours d’absence pour faire campagne. Ces absences ne sont là encore pas rémunérées mais le candidat peut demander à les imputer sur ses congés payés.
La formation : oui, c’est un droit !!
Tous les élus, y compris les élus d’opposition bénéficient d’un droit à la formation et de 18 jours de congés (sur toute la durée du mandat, demande à effectuer par écrit 30 jours à l’avance auprès de l’employeur).
Votre formation doit être dispensée par un organisme agréé (mais des réformes sont en cours, alors vérifiez bien l’état du droit !) et peut être financée par votre droit individuel à la formation (DIF) ou sur le budget formation de votre collectivité.